On dit que tous les artistes ont une palette.  Je n’y croyais pas tant jusqu’à ce que je réalise que j’ai une très forte tendance à piger dans les couleurs primaires et secondaires du cercle chromatique.  Pas de couleurs pastel, pas d’atténuations.  Que du vif, du vitaminé et vibrant.  Et je suis un peu comme ça.  Dynamique, motivée, enthousiaste et vive.  Pas étonnant, donc : lien direct.  Mais…  J’ai une confession à vous faire.

L’aînée de mes filles, Mathilde, lorsque petite (3-4 ans), optait toujours pour le noir dans ses dessins.  Et des couleurs bien laides et sans attrait – selon moi – comme l’ocre, le gris, le brun.  Eurk!  Dominance du noir, toutefois.  NOIR.  Couleur de deuil, de mort, de peur, d’ombre, de solitude.  GRIS, couleur de dépression.  BRUN, vomi, vidanges, putréfaction.  OCRE, diarrhée de bébé.  KAKI caca caca caca.  Ça.  Me.  Rendait.  FOLLE!

 

Dessins enfants - Mon enfant choisit des couleurs bizarres

Je lui tendais de belles couleurs vives, qu’elle acceptait certes, mais qu’elle utilisait rapidement, pour se débarrasser, et elle retournait vers sa palette « nuances de compost. »  Moi, qui trippe tant sur l’art, la créativité, la peinture, les couleurs pimpantes, prise avec une enfant qui aimait les couleurs de la pourriture.  (Mise en contexte : Mathilde est ma première née et, comme beaucoup de mamans que je croise aujourd’hui mais qui ne se l’avoueront jamais, j’étais très très à l’affût du développement de mon enfant, lisant, me documentant, voulant à tout prix qu’elle soit belle, bonne, fine, capable, remarquable.  Pffff…  Vous imaginez?  Une mère dans cet état de bienveillance ultra-bienveillante prise avec une enfant qui visiblement devait avoir un grand trouble psychologique puisqu’elle fuyait l’arc-en-ciel pour aller gambader dans la boue gushmu corrompue…  Choc.)  (Aveu : il fut même un temps ou je retirais carrément ces couleurs des choix offerts lors de nos séances brico afin de l’amener à, disons, « ouvrir ses horizons!!! » – mais surtout, ne le dites à personne!)

HAHA!  Rassurez-vous!  Bien de l’eau a coulé sous les ponts depuis et j’irais même jusqu’à dire que je suis plutôt devenue, grâce à ma deuxième, une mère bien plus ouverte et fascinée par l’expression de la personnalité de ses enfants que « control freak » de leur développement.

 

Pastels differents - Mon enfant choisit des couleurs bizarres

Quoi retenir de tout ça?  Car j’en ai vu d’autres parents s’inquiéter que leurs enfants dessinent toujours avec les mêmes couleurs.  Ou pire, dessinent toujours la même chose, et s’en faire tout autant que moi (allez, allez, avouez)!

Selon moi, le dessin, c’est comme le langage.  Pourquoi certains bébés disent-ils « mama » avant « papa », et que d’autres diront de fourmi « une foulmi » ou « foumi »?  Idem pour leur expression graphique.  On ne peut s’attendre à ce qu’ils aient tous le même cheminement.  C’est une expression de la personnalité.  Et tenter d’interpréter le dessin c’est un peu comme observer des nuages dans le ciel.  Chaque personne y trouvera quelque chose de différent!  Un enseignant validera dans l’oeuvre de l’enfant le respect des consignes exigées tandis qu’une maman parano comme moi y verra une dysfonction quelconque et courra chez le psy avec son enfant sous le bras réclamant un diagnostic sur le champ!  Parions que le psy diagnostiquera maman plutôt que choupette…

La réponse, donc?  Laisser aller.  Il s’agit d’exploration, de recherche, d’essais et de découverte.  Le noir est très souvent choisi par les enfants car il contraste beaucoup sur le papier.  Aussi bête que ça.  Idem avec le rouge (je vous vois venir : le sang, la rage, la violence…) : CALMEZ-VOUS!!!  Ce n’est que passager.  Idem si votre enfant dessine toujours la même chose : il est tout simplement dans sa zone de confort.  J’ai le souvenir très précis d’une phase de fenêtres à quatre carreaux que j’ai eue toute petite.  Si j’en ai dessiné, des fenêtres à quatre carreaux.  Je jubilais sur le fait de prendre un carré et de le transformer en 4 carrés.  4 carrés égaux!  Boum!  Magie!  Alors imaginez si ma mère avait vu là un trouble quelconque.  Elle aura pu faire placarder toutes les fenêtres de la maison…

Les phases durent généralement quelques semaines voire quelques mois tout au plus.  Si on parle d’années, par exemple votre fils couvre tous ses dessins de noir depuis qu’il a 4 ans et il en a 7 aujourd’hui, eh bien là, je me poserais plus de questions, et je lui en poserais certainement aussi…

Sinon, laissez aller.  Échangez avec votre enfant sur ces choix – pourquoi la robe de maman est-elle mauve, pourquoi tu as peint la maison verte -, et voyez ce qu’il vous confie (vous pouvez même noter sa réponse à l’endos du dessin, en souvenir).  Et de grâce, ne faites pas comme moi : laissez toutes les couleurs disponibles, même les « nuances de compost! »  Aucun frein à sa créativité!  Et c’est d’ailleurs un avantage : toutes les couleurs de sa boîte finiront par être usées!

P.S. : Ma grande fille va très bien aujourd’hui.  Non, elle ne s’habille pas en couleurs vomi, oui, elle a des ami(es) et une vie sociale et non, elle n’a pas subi de traumatisme quelconque à cause de cette phase de choix de couleurs – et moi non plus d’ailleurs! (FIOU! ;-)).

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